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Prix COAL 2024 : Yan Tomaszewski




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Le Prix COAL 2024 a été décerné à Yan Tomaszewski pour son projet Sequana. Le prix spécial du jury a été attribué au collectif C.A.R (Cellule d’Action Rituelle) pour son projet Un Cycle.  Pour le 2eme fois, deux mentions spéciales ont également été décernées : la mention Ateliers Médicis à Carla Gueye pour son projet Corps Immergés et la mention Centre WallonieBruxelles/Paris en partenariat avec le Centre Wallonie-Bruxelles/Paris à MITR collective pour son projet MITR (Made in the River).

Les Prix seront décernés le 20 novembre 2024, à l’occasion de la deuxième édition de SANS RÉSERVE, le nouveau rendez-vous de la création engagée pour l’écologie lancé par COAL au Musée de la Chasse et de la Nature à Paris.

À l’heure où le seul registre du savoir ne suffit plus à motiver l’action, le Prix COAL 2024 Se Transformer appelle à la transformation du dedans, celle des sens, celle du soin, celle de soi avec les autres et les autres qu’humains. Un appel à voir dans la culture le terreau de notre relation à la nature et, par-là même, notre plus bel atout pour mettre en œuvre un changement radical et soutenable.

an Tomaszewski est lauréat du Prix COAL 2024 pour le projet multidisciplinaire Sequana qu’il développe depuis 2020. A travers celui-ci, il propose un renouveau des imaginaires de la Seine en réactivant la mémoire d’un autre rapport possible au fleuve basé sur le dialogue, l’empathie, le soin et le protocole de don et contre-don. Partant des milliers d’ex-voto jadis offerts à Sequana, la déesse guérisseuse de la Seine, il engage un projet global et au long cours basé sur la création de processus multiples : sculptures pour purifier le fleuve et mesurer ses polluants ; gestes d’offrande et rituels néopaiëns ; cocréation d’un collectif de Gardien.ne.s de la Seine autour de l’attribution d’une personnalité juridique au fleuve, participation à des mouvements activistes luttant contre un giga projet destructeur en bord du fleuve, collaborations scientifiques, et réalisation in fine d’un film.

Il y a deux mille ans était vénérée Sequana, la déesse guérisseuse de la Seine. Des milliers d’ex-voto en pierre, en métal et en bois, représentant les parties du corps en souffrance – mains, pieds, cœurs, poumons… ont été retrouvés dans l’ancien sanctuaire qui lui était dévolu à sa source en Côte-d’Or. Un mythologue, avec qui collabore l’artiste, a également mis en évidence, de façon statistique, l’association entre des figures locales de saints sauroctones (figure du saint domptant ou tuant un monstre surgi des eaux) avec les zones inondables le long de la Seine. Ces saints, en charge de maîtriser le cours d’eau, serpent maléfique, méandreux et indomptable, apparaissent ainsi comme une incarnation métaphorique de toutes les artificialisations ayant permis de « canaliser » le cours du fleuve, au sens propre comme au sens figuré, pour le transformer in fine en une autoroute fluviale, adaptée à la circulation des hommes et des marchandises.

Pour dépasser cette vision utilitariste, l’artiste et cinéaste Yan Tomaszewski tente de réactiver des sagesses oubliées en puisant dans des formes, des gestes et des manières d’être réparatrices et empathiques. S’inspirant des ex-voto retrouvés – myriade de fragments de corps témoignant d’un corps social riche d’un autre rapport au fleuve basé sur le soin-, il produit et active des sculptures guérisseuses qui régénèrent d’anciens gestes d’offrande, de sacrifice et de dialogue avec la rivière. Ces sculptures en bois sont brûlées et transformées en charbon actif, une matière ultra-absorbante utilisée pour la purification de l’eau. Puis, emmaillotées dans les linceuls, ces sculptures sont immergées lors de processions contribuant symboliquement, mais aussi concrètement, à la purification de l’eau. Ainsi gorgées de polluants et d’impuretés, ces sculptures « martyres » sont analysées pour révéler ce que leur matière a pu absorber. Outre les polluants biologiques particulièrement recherchés dans le cadre de la démarche utilitariste des JO, de nombreux polluants chimiques ont été trouvés, révélant l’impact de dangerosité insidieuse sur le long terme, pour la santé des éco-systèmes fluviaux.

Le projet Sequana donne par ailleurs lieu à un travail de terrain au long cours auprès de différentes communautés établissant chacune à leur manière un lien spécifique et symboliquement transformateur avec la Seine. L’artiste collabore notamment avec des cercles néopaïens qui animent des rituels de reliance spirituelle au fleuve par un ensemble de gestes de célébrations, de soins et d’offrandes.

Ses travaux se nourrissent également d’un autre terrain de transformation profonde de nos représentations : celui des mutations juridiques et politiques relevant des droits de la nature. Dans le sillage des combats des peuples autochtones ayant abouti à l’attribution de personnalités juridiques à des fleuves (en Nouvelle Zélande et en Colombie notamment), il cofondent en 2021, avec la juriste Marine Calmet, le collectif citoyen des Gardien·ne·s de la Seine (laseineencommun.org). Le collectif milite ainsi pour une refondation d’une organisation humaine compatible avec le respect des écosystèmes présents dans le bassin versant du fleuve, et la protection des droits de tous les êtres, humains et non humains, face aux conséquences du dérèglement climatique et l’extinction de la biodiversité.

Yan Tomaszewski a travaillé auprès des Soulèvements de la Terre Ile-de-France sur les représentations, mythes et symboles liés à la Seine pour alimenter la mobilisation sociale grandissante s’opposant au projet Green Dock, un méga entrepôt logistique qui doit être construit en bord de Seine, en face de la zone Natura 2000 de la pointe de l’Île-Saint-Denis.

Yan Tomaszewski (France/Pologne), né en 1984 à Seclin (Hauts-de-France), est un artiste et réalisateur Franco-Polonais. Son travail touche à des sujets aussi variés que la vie des pierres, le néopaganisme, la chirurgie esthétique, l’astrochimie ou la psychanalyse. Le corps hybridé est le dénominateur commun de ses projets. Les formes qu’il produit s’inscrivent dans un processus documentaire qui conjugue enquête de terrain, travail en atelier, écriture et tournages. Ses sculptures ont souvent une double destination : celle d’être installées dans un espace d’exposition ou activées par la performance ou le film. Formé aux Beaux-Arts de Paris et au Studio national des arts contemporains du Fresnoy, ses oeuvres ont été montrées au IDFA Amsterdam, FIFA Montréal, FID Marseille, au Centre Pompidou à Paris, au MAC VAL à Vitry-sur-Seine, aux Ateliers Médicis, au musée Carnavalet ou encore au MAK Center for Art and Architecture à Los Angeles.







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