ArtCatalyse : l'art qui dialogue avec l'environnement

Exposition en cours


  L’art qui dialogue avec l’environnement



Jérémy Gobé, Où nous allons

La Traverse centre d’art contemporain, Alfortville

27.09 - 07.12.2024




 







 




 

 












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Durant son projet de protection des coraux – entre autres le bouturage qu’il utilise sur des fragments vivants avec une colle biopolymère entièrement écologique et biocompatible de son invention sans impact sur la nature – Jérémy Gobé a bénéficié d’une bourse des Métiers d’Excellence LVMH qui lui a permit de nouer une collaboration avec cinq réfugiées artisanes d’art développant une nouvelle activité avec la Fabrique Nomade à Paris. Il leur a proposé de créer chacune un modèle de corail à travers leur pratique propre : Anna-Karina Raga, bijoutière, a étudié le corail « feuille de laitue », la céramiste Faten Al Ali le corail champignon, la crocheteuse Fiorella Gonzalez le corail roi, la bijoutière Ghazaleh Esmailpour Qouchan le corail « Cerveau Neptune », enfin la brodeuse Serap Karabulut le célèbre corail Gorgone, chaque spécimen présentant nombre de difficultés pour leur concrétisation de ces matières bien spéciales et différentes. Ce travail en commun a donné lieu en 2021 à l’édition de Conversations Ex Situ, cinq livres coffrets sculptés comme un écosystème en matériaux divers (coton, métal, nacre, etc.), coffret, dessin à la pierre noire, papier imprimé, mosaïque de nacre, broderies, crochet, ferronnerie de métal, dans une dimension approximative de 80x80x80cm.

Jérémy Gobé a souligné le courage de ces cinq artisanes pour quitter un environnement hostile dans leur lieu d’origine et se rejoindre à la Fabrique Nomade pour entamer en France une nouvelle vie de créations avec les bons outils dédiés à leur pratique. « Après avoir rencontré ces cinq artisanes, j’ai compris que, tout comme le corail, leurs créations, leurs cultures mêmes, étaient en danger. J’ai aussi compris que chacune avait envie de se dépasser, de faire évoluer sa pratique. Je leur ai donc lancé un défi de taille : reproduire de manière sensible un corail que j’avais soigneusement choisi pour chacune, en fonction de leurs techniques, mais aussi de leurs personnalités. Le but : montrer au public la beauté de ces animaux si importants pour notre planète, tout en offrant un ensemble créatif serein, propice à leur épanouissement créatif.

À l’image du corail, les œuvres à naître devraient être une création individuelle qui participerait à un ensemble, tels les polypes de coraux qui, réunis et partageant le même squelette, forment un récif. Elles devraient également contenir une trace du chemin parcouru ensemble. C’est pourquoi j’ai choisi une forme hybride, entre livre et sculpture : un coffret dont la tranche serait le socle de nos œuvres et dont l’intérieur abriterait le présent ouvrage, témoin de nos échanges. »


Exposition du 27 septembre au 07 décembre 2024. La Traverse centre d’art contemporain, 9 rue Traversière – 94140 Alfortville. Té. : +33 (0)1 56 29 37 21 / 07 83 57 28 32. Ouverture du mardi au samedi de 15h à 18h. Fermeture exceptionnelle le vendredi 15 novembre.

Le corail, « arbre des eaux », participe du symbolisme de l’arbre (axe du monde) et de celui des eaux profondes (origine du monde). Le corail rouge serait né, selon une légende grecque, des gouttes de sang versées par la Méduse, l’une des Gorgones. Sa tête, tranchée par Persée, se serait transformée en corail, tandis que du sang jaillissant naissait Pégase. Le symbolisme du corail tient aussi du fait qu’il présente la particularité de rassembler en sa nature les trois règnes animal, végétal et minéral. Comme le souligne Jérémy Gobé, « c’est un animal qui crée un squelette minéral et qui vit en symbiose avec des micro-organismes végétaux. » Très utilisé dans ses formes naturelles par les orfèvres baroques d’Europe centrale du 16ème au 18ème siècle, il donne naissance, associé à des figures de métal précieux, à toutes sortes de monstres et d’êtres mythiques, qui en font une représentation matérielle innée de l’imaginaire, du fantastique.

Jérémy Gobé présente ainsi son projet, bien résumé, lors d’un entretien avec Bettie Nin, commissaire de l’exposition à La Traverse, enregistré en juillet 2024 :

« Le premier chapitre de 2010 à 2017 a concerné toute mon exploration du corail : apprendre à le connaître graphiquement, artistiquement, spatialement et scientifiquement. De 2017 à 2020, j’ai exploré les hypothèses et j’ai fait des tests comme d’associer la dentelle au bouturage. De 2021 à 2023, ça a été la mise en écriture et la validation scientifique à travers des brevets. Et aujourd’hui, j’entame une phase in situ pour commencer à créer des cercles vertueux avec les populations locales et avec les ressources locales. » Jérémy Gobé mentionne l’importance du corail pour notre planète, certains scientifiques l’estimant plus essentiel que la forêt amazonienne pour l’oxygène et notre vie sur terre.

Le Triangle du corail est une région maritime située à l’Ouest de l’océan Pacifique qui comprend les eaux bordant l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Timor oriental et les îles Salomon. Elle s’étend sur 6 millions de km², une surface immense où s’épanouit une biodiversité marine prodigieuse. Mais ces espèces sont déjà dans certaines régions du globe en grand danger. Selon une nouvelle étude de l'UNESCO, les récifs coralliens du monde entier (de la Grande barrière de corail située au large de l'Australie aux Seychelles au large de l'Afrique de l'Est) sont menacés de disparaître complètement d'ici 2050 si les émissions de carbone ne diminuent pas suffisamment pour ralentir le réchauffement des océans. Sur les 29 zones de récifs classées au patrimoine mondial de l'UNESCO, au moins 25 seront victimes de deux phénomènes graves de blanchissement par décennie à l'horizon 2040. Cette fréquence « anéantira rapidement la plupart des coraux présents et entravera la reproduction nécessaire au rétablissement des coraux », a conclu l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture. Ce qui est d'ores et déjà en train de se produire dans certaines régions. Selon Scott F. Heron, collègue de Mark Eakin et co-auteur de l'étude, certaines personnes souffrent déjà des conséquences, qui vont rapidement s'aggraver. Les îles à basse altitude, à l'image des Kiribati, une série de 33 atolls coralliens dans l'océan Pacifique central, voient d'ores et déjà l'eau salée submerger les sources d'eau douce. Les marées plus fortes et la détérioration des récifs provoquent davantage d'ondes de tempêtes. La disparition des coraux, en particulier lorsqu'elle est associée à la surpêche, se traduira par une raréfaction du poisson ainsi que par une pénurie des protéines locales.

Communiqué de presse

Où nous allons rassemble une série de pièces retraçant l’histoire du projet art & science Corail Artefact mené par Jérémy Gobé, expérimentées de 2010 à nos jours à travers un ensemble de propositions diverses - esthétiques, fonctionnelles et éthiques – visant à lutter contre la disparition des coraux.
L'artiste expose des œuvres inédites et variées qui donnent à voir la recherche artistique et scientifique depuis son départ. Chaque période charnière est présentée, comme sa découverte des corau, ses premiers Corail Restauration, des prototypes sculpturaux, des tissus, dentelles et tricots, des dessins préparatoires, des inventions de matériaux écologiques, des bouturages permettant la régénération des récifs corallien.

Le titre de l’exposition est tiré d'une citation d'Alan Turing « La science ne nous dit pas où nous allons – c’est le rôle de l’art – ; elle nous dit où nous sommes. ».

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Jérémy Gobé, Où nous allons, La Traverse CAC Alfortville